Imaginez.
Vous êtes un porte-avion. Vos enfants sont les petits avions qui décollent.
S’il y a du danger, ils reviennent se poser.
Sauf, bien sûr, si le porte-avion est “dysfonctionnel” pour cause de panne (fatigue), radars KO (inattention), alerte rouge (“je me sens en danger !”).
Dans ce cas, le petit avion est désemparé. Il essaye de revenir encore et encore jusqu’à ce qu’il puisse atterrir et récupérer du carburant (l’amour et les soins).
Mais si l’indisponibilité est permanente ou très régulière, le petit avion n’a d’autres choix que de chercher un autre porte-avions, de se résigner à se débrouiller seul en devenant tant bien que mal un grand avion…jusqu’au crash si l’épreuve est trop difficile.
Heureusement, ce crash n’est pas définitif. Les pièces se remplacent, de nouveaux liens se créent avec des mécaniciens (figures d’attachement, caregiver). La résilience s’active mais prend du temps.
Cette métaphore du porte-avion illustre l’attachement, notion portée par John Bowlby, un psychiatre et psychanalyste britannique, célèbre pour ses travaux sur l’attachement et la relation mère-enfant.
C’est le sujet principal du livre de Dr Anne Raynaud “La sécurité émotionnelle de l’enfant”.Elle nous y apprend comment être en lien avec nos enfants dès leur naissance. Un lien de qualité, aidant, valorisant et aimant. Un lien qui dure quelle que soit la configuration de la famille et les aléas de la vie. Ce n’est pas pour rien si Catherine Gueguen a préfacé cet ouvrage. On y retrouve le même discours bienveillant et conscient associé à un regard pragmatique à la lumière des découvertes en neurosciences.
Ce livre est précieux car il offre la perspective de l’enfant et celle du parent. Ce jeu d’empathie aide à comprendre et à se connecter à nos propres enfants en cheminant intérieurement.
“J’ai juste 4 ou 5 ans et j’ai encore envie de prendre du temps pour jouer. Alors les “grands” me disent que je suis immature, que je ne gère pas la frustration et que mes émotions me débordent. J’ai l’impression qu’ils n’ont pas encore compris que mon cerveau n’est pas encore câblé pour que je sois capable de faire tout cela ! Ils pensent que je suis un “mini-adulte”.”
Les neurosciences affectives ont démontré que les enfants ne sont pas des “mini-adultes”.
Il est nécessaire de retenir deux informations essentielles sur leur cerveau :
il est extrêmement sensible et vulnérable (surtout pendant les 3 premières années de la vie)
il est malléable. Il se construit en s’ajustant à l’environnement qui l’entoure et qui lui offre des expériences affectives et relationnelles qui influenceront de manière profonde son développement.
Devenir un porte-avions pour son enfant
Un porte-avions a pour fonction première de prendre soin et d’apporter des soins à l’enfant (Caregiver) lorsqu’il en a besoin ou par anticipation. Ainsi, l’enfant en croisera beaucoup sur sa route.
Deux sortes de soins ont été distingués :
le holding : soins donnés à l’enfant par la mère et sa capacité à contenir ses angoisses sur le plan physique (porter dans les bras, câliner, bercer,…) et psychique (décrypter et accueillir les émotions de l’enfant)
le handling : il s’agit des soins de base (le laver, le changer, l’habiller, le nourrir,…)
Ainsi, le “donneur de soins” a au moins 3 qualités :
sensibilité et empathie
disponibilité psychique et émotionnelle
présence importante et régulière
Des qualités dont l’expression dépend aussi de l’attachement du caregiver. Si un parent se sent en danger, il ne pourra pas prodiguer ce type de soins, trop occupé à se défendre ou à chercher son propre porte-avions.
En tout, il y a 4 modèles d’attachement :
attachement sécure : l’enfant reçoit soutien et confort quand il est en détresse. Il a confiance en son porte-avions et cela lui permet d’explorer sereinement et de se lier aux autres.
attachement insécure évitant : le porte-avions est presque jamais disponible car inquiet et perturbé émotionnellement. Il “repousse” inconsciemment l’enfant qui apparait comme un danger supplémentaire. L’enfant tente se débrouiller sans ses figures d’attachement pour ne pas souffrir de cette non-réponse. L’enfant sera plus vite autonome mais ne se sentira pas compris et plutôt solitaire.
attachement insécure ambivalent : le porte-avions est tantôt disponible tantôt indisponible. Mais nos enfants ne comprennent pas ce fonctionnement non balisé. Cette confusion pousse l’enfant à adopter des comportements provocateurs et opposants pour attirer l’attention de leur figure d’attachement.
attachement désorganisé : le petit avion est attaqué par son porte avions. Le danger venant de la personne censée lui apporter du réconfort, l’enfant est perdu… sa boussole est complètement déréglé. Ce type d’attachement peut être la cause de troubles psychologiques et psychiatriques sur le long terme.
J’espère vous avoir donné envie de poursuivre la lecture de ce magnifique livre du Dr Anne Raynaud. Nous avons tous besoin de ces liens d’attachement pour nous épanouir. La sécurité émotionnelle de l’enfant dépend de la sécurité émotionnelle de l’adulte. Et ce n’est qu’en se sentant attaché que nous pouvons nous détacher pour explorer de nouveaux horizons.
Un ouvrage à lire et à offrir aux parents et futurs parents.
Présentation :
Crises de colère incontrôlables, réveils nocturnes incessants et éreintants, comportements d’opposition et agressivité… les parents recherchent souvent des réponses aux problèmes qu’ils rencontrent dans l’éducation de leur enfant. Certes, les connaissances sur le développement de celui-ci ont ouvert de nouvelles approches mêlant bienveillance et pédagogies alternatives pour qu’il se construise sereinement ; mais il est, selon la pédopsychiatre Anne Reynaud, un besoin fondamental, un pré-requis sans lequel cette construction ne peut se faire que difficilement : la sécurité émotionnelle. L’enfant a en effet besoin de grandir dans un environnement stable, sécurisé, entouré de repères ; c’est par l’instauration d’un lien d’attachement fort et de qualité, par une disponibilité affective à toute épreuve que l’adulte va erre en mesure d’écouter, comprendre, rassurer, soutenir et accompagner ses émotions. Sans cette sécurité émotionnelle, toutes les bonnes volontés, toute éducation, aussi “positive” soit-elle, sont finalement vouées à l’échec. Anne Raynaud livre ici les dés pour comprendre, appliquer et alimenter ce besoin. Elle nous confronte à ce que le petit enfant perçoit de notre monde organisé autour du temps qui file, des écrans, de la performance… En nous invitant à explorer les pensées de l’enfant, elle nous incite à adapter notre comportement pour créer et nourrir le lien à partir duquel il déploiera toutes ses potentialités. Un livre qui offrira une aide précieuse à mus les adultes en charge de l’éducation des enfants (parents, éducateurs, enseignants, juges et politiques).
댓글